En 2005, la mission spatiale Mars Express a découvert des aurores dans l’ionosphère de Mars. Cependant, elles ont été mesurées dans le domaine UV et, de ce fait, tous les scientifiques ne les ont pas qualifiées d’aurores, ces dernières étant généralement visibles à l’œil nu. J’étais dans l’équipe en charge de la modélisation, ce qui nous a permis de caractériser les caractéristiques du vent solaire à l’origine de ces émissions. Dix ans plus tard, grâce à des expériences en laboratoire et à de nouvelles modélisations, j’ai pu prédire que ces mêmes émissions UV avaient leurs équivalents dans le domaine visible : bleu (412 nm et 434 nm) et vert (557,7 nm) à 140 km de hauteur, rouge (630 nm) à 160 km.
Un nouvel article a été publié, suscitant beaucoup d’enthousiasme, surtout car dans certaines occasions, ces aurores devraient être suffisamment intenses pour être visibles à l’œil nu. La course a alors commencé pour les photographier. Aucune expérience spatiale n’est en réalité pleinement capable d’une telle performance. Nous avons donc eu l’idée de profiter des oppositions régulières de Mars (environ tous les 2 ans) pour les observer depuis la Terre, avec l’aide des astrophotographes. En 2020, nous avons eu une détection positive. Cependant, une analyse approfondie – en particulier photométrique – a prouvé qu’il ne s’agissait pas d’aurores, mais de nuages de haute altitude (92 km de hauteur). Un modèle de transfert radiatif a montré qu’ils sont probablement dus à des cristaux de glace de CO2, bien que la glace d’eau ne puisse être totalement exclue pour l’instant. Cet article a de nouveau suscité beaucoup d’intérêt dans différentes communautés, et a remporté le prix Gemini 2023. En 2022, nous n’avons pas eu de chance avec la météo et n’avons pas pu faire d’observations intéressantes. La prochaine opportunité sera fin 2024/début 2025. Notre groupe a décidé d’agrandir considérablement le pool d’observateurs afin de couvrir toutes les latitudes, tous les continents, pour assurer une observation positive avec un double objectif : caractériser ces nuages étonnants et voir, pour la première fois, les aurores, profitant du maximum solaire du cycle 25. Cela est particulièrement intéressant, car une première détection indirecte semble avoir eu lieu en mai avec un instrument spatial sur Mars.
Contacts
Jean Lilenstein, Univ. Grenoble, jean.lilensten@univ-grenoble-alpes.fr
Jean-Luc Dauvergne, S2P, jl.dauvergne@cieletespace.fr
Christophe Pellier, SAF, chrispellier@sfr.fr
Marc Delcroix, SAF, delcroix.marc@free.fr
Emmanuel Beaudoin, UPS, e.beaudoin@universite-paris-saclay.fr
Protocole d’observation
Il s’agit d’observer Mars dans plusieurs gammes photométriques (bleue, verte, rouge, RGB). Le diamètre minimum recommandé est de 200 à 250mm pour avoir suffisamment de résolution et de lumière sur les phénomènes recherchés. Une caméra couleur est utilisable mais une monochrome est conseillée si on veut faire des images dans différentes longueurs d’onde. Dans ce cas, une roue à filtre est un plus évident pour séparer les longueurs d’onde.
Il faut prendre des images planétaires classiques de Mars, en priorité en lumière bleue (filtre bleu large) pour la détection de nuages de haute altitude ou d’aurores, mais une analyse photométrique (roue à filtre) est un plus important. Il faudrait faire plusieurs images de manière à pouvoir suivre l’évolution et la rotation (avec la planète) potentielles d’une formation suspecte détectée.
Spécifiquement pour les aurores
- En plus un filtre étroit spécifique autour de 425nm est conseillé. Il est disponible ici : https://www.edmundoptics.fr/p/425nm-cwl-25mm-dia-hard-coated-od-4-50nm-bandpass-filter/29361/, Il faudra trouver un moyen de l’adapter aux coulants utilisés en astronomie. Il faudra faire des séquences avec un filtre bleu large et le filtre bleu étroit.
- On suspecte que les aurores seront observées autour des zones de magnétisme résiduel de la surface martienne, la principale étant autour de –30° de latitude et 170° de longitude, donc avec cette zone (qui est assez large, voir carte ci-dessus) proche du limbe, ou du méridien.
- Comme pour les aurores terrestres, elles pourront être plus visibles dans une période de forte activité solaire dirigée vers la planète.